Edito de Bernard Carayon
L’intelligence économique française ou européenne: c’est la politique du moment!
Lorsque le Premier Ministre, me confie, en 2003, une mission sur l’Intelligence économique [1], j’auditionne avec mon équipe en quatre mois plus de 400 personnes issues du monde politique, de la haute fonction publique, de l’entreprise, de centres de recherche, de l’Université et des services de renseignement. Le rapport ne fait l’objet d’aucune critique politique ou technique. Alors que l’intelligence économique n’avait été décrite, en particulier dans le rapport Martre (1994), que comme une méthode d’entreprise, associant la veille et les méthodes d’influence, destinée aux seules entreprises, mon rapport définit les contours et le contenu d’une politique publique, nouvelle, comme l’ont été en leur temps les politiques du logement ou de protection de l’environnement. Elle repose sur des postulats aujourd’hui couramment acceptés :
– la mondialisation n’est pas une idéologie, porteuse de bonheur et de prospérité ou malheureuse et génératrice d’inégalités : elle s’incarne dans des faits, sources d’opportunités à saisir ou de risques dont il faut se prémunir. En ce sens, « démondialiser » n’a pas plus de sens que « mondialiser » !
– les relations économiques internationales ne reflètent pas, systématiquement, un marché pur, parfait et transparent, mais souvent des rapports de force, portés par les stratégies des Etats-Nations et s’exprimant à travers des distorsions de concurrence, savamment organisées : il y a bien une « guerre économique », des guerres monétaires et commerciales. L’expression, jadis taboue, est entrée dans le langage commun.
– tous les marchés ne se ressemblent pas : dans certains d’entre eux, les critères classiques de l’économie libérale, le prix et la qualité des produits et des services, s’imposent ; dans les marchés « stratégiques » (Défense, énergie, Technologies de l’Information et de la Communication, santé, aéronautique et spatial), c’est la main de l’Etat qui s’impose, partout.
– les retards européens et français se mesurent facilement à l’aune des outils technologiques, juridiques, institutionnels et financiers mis en place par nos principaux compétiteurs. Les yeux ont commencé à s’ouvrir: même les commissaires européens, MM. Tajani et Barnier, étudient l’idée d’un « CFIUS à l’européenne », dont nous avions plaidé la nécessité à Prometheus depuis plus de cinq ans.
– les entreprises ont bien une nationalité : non pas celle que définissent les avocats à l’aide de critères juridiques, mais celle des gouvernements selon le seul critère –politique- qui vaille : le président de la République, dans ses voyages internationaux, se fait le chantre d’Airbus et non de Boeing, d’Alstom et non de Siemens. Et dans l’OPA de Mittal sur Arcelor, tandis que tous les observateurs s’efforcent de rechercher des traces d’européanité chez Mittal, le Premier ministre indien, recevant le Président Chirac, l’invite à rester « fair », signant ainsi la nationalité de Mittal…
Une politique d’intelligence économique s’appuie sur quatre missions : une politique d’identification et de protection de nos intérêts industriels et scientifiques stratégiques (là où précisément la France et l’Europe, jouent non seulement leur compétitivité mais leur destin, leur indépendance) ; l’accompagnement de nos entreprises dans la conquête des marchés internationaux ; l’influence auprès des organisations internationales où s’élaborent règles juridiques et normes professionnelles ; la formation enfin, technique ou générale, initiale ou continue, de nos étudiants, de nos chercheurs, des cadres des entreprises comme des administrations publiques. Ces missions sont assurées aujourd’hui par une délégation interministérielle ; leur pertinence a été soulignée dans une récente instruction interministérielle du Premier ministre. Elle constitue une approche rénovée –et mutualisée (publique-privée) – des politiques industrielles qui n’avaient pris en compte, au cours des trente dernières années, ni l’émergence de nouveaux acteurs (fonds, ONG, fondations), ni anticipé les fantastiques transferts de puissance de l’Ouest vers l’Est du monde.
Pas de politique d’intelligence économique sans patriotisme économique, ni de patriotisme économique, ceci dit, sans primat industriel, condition de nos indépendances économiques et de la pérennité de la Recherche. Le patriotisme qui nous paraît si naturel lorsque « notre » équipe de rugby affronte les All Blacks, doit évidemment être mis au service de la protection et de la promotion de nos emplois, de nos technologies et de notre indépendance.
Bernard Carayon
[1] Intelligence économique, compétitivité et cohésion sociale, la Documentation française (2003)
Pourquoi et comment investir dans des pays instables ?
Par Jean-Pierre VUILLERME, Directeur du Management des Risques à l’ADIT, et Philippe CADUC, Président Directeur Général de l’ADIT

L’entreprise est devenue globale. Elle ne peut plus limiter ses ambitions à son seul territoire d’origine, qui correspond le plus souvent à son marché « historique », naturellement accessible.
Pour assurer son développement – et dans certains cas sa survie – elle doit sans cesse conquérir de nouveaux clients, sur de nouveaux marchés, car la croissance est souvent synonyme de survie !
La réussite se construit pas à pas, de façon méthodique, en identifiant les menaces, en analysant les risques, en saisissant les opportunités y compris dans les marchés « émergents », par nature instables.
Les évènements réputés « imprévisibles » peuvent toujours être anticipés…
L’intuition n’est plus suffisante pour garantir la performance : il est plus que jamais nécessaire pour l’entreprise de prendre en compte ses environnements, et leur évolution rapide, dans l’élaboration d’une vision stratégique robuste. Il lui faut donc naturellement caractériser le contexte protéiforme dans lequel elle exerce son activité, mais aussi anticiper ses évolutions.
Un manager, a fortiori un chef d’entreprise, a un devoir d’anticipation et de préparation à l’inconcevable : il sera jugé sur son action dans le domaine du « prévisible », mais aussi sur sa réaction face à « l’inattendu » ! On devra donc se préparer à gérer des situations de crise censées ne jamais survenir, en évitant deux écueils : une dramatisation excessive des situations ou une sous-évaluation des signaux faibles.
La mise en place d’une méthodologie fondée sur des critères objectifs devient alors essentielle. Les menaces étant identifiées, les risques estimés, viendra alors la mise en place des parades nécessaires pour gérer les risques de toute nature (criminels, politiques, sociaux, terroristes, corruption,…).
Le cas du marché Irakien
Face aux défis de la reconstruction, l’Irak représente une opportunité majeure pour les entreprises françaises : les besoins en termes de reconstruction sont estimés à 600 milliards (USD), le pays possède les troisièmes réserves de pétrole au monde, pour une production escomptée de 10 millions de barils/jour en 2016, et dispose des capacités financières pour financer des projets majeurs de développement.
C’est aujourd’hui un pays qui affiche de puissantes ambitions, dont les ressortissants démontrent au quotidien une volonté et une réelle capacité à développer le « business ».
C’est un pays dans lequel tout est à faire : aménagement du territoire, reconstruction des réseaux, éducation/formation, système de santé,… et bien sûr accompagnement dans l’exploration/ production de gigantesques ressources gazières et pétrolières. C’est une économie en renaissance, dont le dynamisme sera entretenu par le désir de consommation de tous ceux qui ont souffert pendant ces années de pénurie, et par une nouvelle stabilité constitutionnelle.
Un contexte sécuritaire qu’il faut prendre en compte
Soyons objectifs : le pays est encore instable, les affrontements intercommunautaires persistent. Explorer puis développer un business exige de prendre des mesures de protection sérieuses. Ces mesures ont un coût, mais ce coût « sécuritaire » est le même pour toutes les entreprises, quels que soient leurs pays d’origine ; il n’affecte donc pas la compétitivité de leurs offres !
Nos entreprises disposent d’atouts majeurs
La France dispose d’une excellente image dans ce pays, mais nos entreprises sont encore trop réservées, et les autorités locales soulignent souvent – en le regrettant – leur absence !
La réussite dans ce pays passe par une implantation physique : c’est une condition incontournable pour espérer accéder à des marchés.
Conscient à la fois des enjeux et des freins, l’Ambassade de France en Irak a été à l’origine d’une initiative remarquable : l’implantation d’un Centre des affaires en plein cœur de Bagdad, plus précisément en « zone rouge » dans le périmètre de sécurité de l’Ambassade. Ce choix est judicieux, car il est difficile et coûteux en temps de se rendre en « zone verte » (multiples contrôles pour les étrangers comme pour les irakiens) alors que le développement des affaires exige d’établir rapidement des relations et nécessite des contacts fréquents, tant avec des partenaires potentiels qu’avec les autorités du pays.
La situation géographique du Centre présente en outre l’avantage d’un accès facile aux différents services de l’Ambassade en bénéficiant ainsi de leur appui institutionnel (Chancellerie, Mission Economique, Consulat, …). Il offre des capacités d’accueil (bureaux et hébergement) dans un environnement particulièrement sécurisé.
Outre un appui « opérationnel » (le Centre dispose d’un secrétariat bilingue anglais/arabe ou français/arabe, de capacités d’interprétariat et de traduction, d’une liaison Internet haut débit), le Centre a mis en place une capacité de veille commerciale et stratégique au profit de ses clients (signalement des appels d’offres, suivi sectoriel personnalisé, …). Des études en profondeur sont réalisées à la demande de grands groupes ou de sociétés de taille plus modeste, aux fins de mieux cerner des opportunités d’affaires, d’analyser les processus de décision, ou de préciser les key decision makers.
Le Centre des affaires apporte une excellente réponse opérationnelle à l’ambition des entreprises françaises de prendre pied sur le marché irakien. Il convient cependant d’intégrer le facteur «temps» : si les marchés accessibles sont encore aujourd’hui très nombreux et couvrent pratiquement tous les secteurs d’activité, cette situation est « volatile ». En effet, la nouvelle économie irakienne suscite beaucoup d’ambitions et nos concurrents étrangers y sont extrêmement actifs.
Il est ici pertinent de reprendre la formule du Général Mac Arthur : « Les batailles perdues se résument en deux mots : trop tard ».
Le droit de l’intelligence économique s’écrit-il à Clermont Ferrand ?
Par Olivier de MAISON ROUGE, Avocat – Docteur en Droit, Membre de la commission permanente « secrets d’affaires » de l’AIPPI, Membre du Comité scientifique de l’Institut de l’IE.
Après l’affaire Michelin un nouveau procès pour espionnage économique, s’est tenu devant le tribunal correctionnel de Clermont- Ferrand le 29 août 2011. Dans son jugement du 26 septembre 2011, la juridiction pénale a condamné le prévenu pour abus de confiance et vol d’informations confidentielles à 3 mois de prison avec sursis.
Historiquement basée en Auvergne, et disposant de bureaux et d’un dépôt en région parisienne, la société victime est un acteur significatif et reconnu pour son expérience et sa compétence dans son domaine d’activité de négoce en France et à l’étranger de produits et matières à haute valeur ajoutée.
Cette réussite économique avérée repose notamment sur des secrets d’affaires constitués en partie de son fichier fournisseur, et de son fichier clientèle et prospects.
Pour les besoins de son développement économique, la société victime s’est tournée depuis quelques années vers l’Asie, devenue, dans le cadre de la globalisation des échanges économiques, « l’atelier du monde ».
Elle a ainsi recruté le prévenu dont le précédent emploi l’avait amené à connaître des échanges internationaux de négoce dans cette partie du monde. Ce salarié, d’origine chinoise, parle couramment le mandarin, ce qui devait permettre de structurer et de renforcer les échanges et l’image commerciale de son employeur sur le marché asiatique.
Fin 2008, le prévenu annonce à son employeur qu’il désire quitter l’entreprise, prétextant un divorce avec son conjoint, et déclare souhaiter désormais s’établir à Taïwan. Les parties décident donc d’un départ négocié, suivant rupture conventionnelle du 26 janvier 2009.
A l’issue d’un déplacement professionnel, le dirigeant de l’entreprise-victime prend connaissance de ses e-mails le 13 février 2009. Dans un de ceux-ci, il est alerté par un de ses contacts asiatiques qui s’interroge sur la conduite de son commercial, lequel lui aurait proposé le « fichier commercial » de la société. Après un moment de stupeur, le dirigeant a découvert que le réseau informatique avait été « visité ».
Par voie de conséquence, la société victime déposait immédiatement plainte avec constitution de partie civile pour vol et abus de confiance, d’autant que l’ex-salarié devait quitter le territoire national quelques jours plus tard pour la Chine.
Dûment averties du péril imminent, les forces de sécurité publique envoient au sein de l’entreprise victime leur brigade N-TECH, chargée de prélever les données informatiques et de donner corps au délit (constitution de la preuve).
A l’appui des éléments dégagés, ils dépêchaient ensuite une équipe pour appréhender le prévenu et le placer en garde à vue.
Mis en examen, il a été, au terme de l’instruction, renvoyé devant le tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand pour vol et détournement de biens informationnels.
Le vol d’informations est une première pour ce type d’agissements, quand auparavant les tribunaux ne retenaient que le vol de biens corporels, à l’exclusion des données immatérielles.
Il est reproché au prévenu des faits d’abus de confiance (détournements des fichiers informatiques de données confidentielles) et de vol de données informatiques, réprimés par les articles 311-1 et suivants du Code pénal et 314-1 et suivants du même code.
L’audience de jugement s’est déroulée le 29 août 2011, devant Tribunal de Grande Instance de Clermont-Ferrand (en correctionnelle).
Le procureur a requis, au vu des faits et la jurisprudence en pareille matière, une peine d’emprisonnement de 6 mois avec sursis, tandis que la défense sollicitait la relaxe pure et simple, déclarant que le vol n’était pas constitué et qu’il n’y avait pas de préjudice, le doute devant bénéficier au prévenu.
Dans son jugement du 26 septembre 2011, le tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand a condamné « Mme ROSE » pour abus de confiance et à 3 mois de prison avec sursis et 3.000 € de dommages et intérêts.
Si l’on peut se féliciter d’une telle qualification juridique, il faut toutefois garder à l’esprit qu’un jugement de première instance ne fait pas jurisprudence, même s’il s’inscrit dans une tendance qui semble s’affirmer.
Dès lors, il serait souhaitable, mais surtout impérieux, d’adopter, à l’instar du Cohen Act américain, une loi française consacrant les secrets d’affaires et assurant leur protection, notamment pénale.
Synthèse du rapport d’activité 2011 de la médiation des relations inter-entreprises industrielles et de la sous-traitance
Jean-Claude VOLOT, Médiateur national des relations interentreprises, rend public son premier rapport d’activité. Il fait le point sur le chemin parcouru dans ce domaine et met l’accent sur la nécessité de continuer à développer ces bonnes pratiques pour obtenir un « écosystème en faveur de la compétitivité ».
UNE MEDIATION INDISPENSABLE
Ce rapport revient sur la genèse de cette Médiation. Les Etats généraux de l’Industrie (EGI) avaient en effet souligné la nécessité de rééquilibrer les relations entre les donneurs d’ordres et les sous-traitants. C’est pourquoi dès le début de l’année 2010, cette Médiation a été créée sur trois principes :
– La nécessité de redonner du lien dans les relations par le dialogue : « re-humaniser la relation »;
– L’indépendance stratégique et commerciale des fournisseurs : «contrôler le taux de dépendance» ;
– La responsabilité des leaders de filières : «développer des écosystèmes économiques intelligents».
Jean-Claude Volot a été nommé, le 8 avril 2010, Médiateur des relations interentreprises et de la sous-traitance. Il intervient en soutien des équipes régionales installées au sein des DIRECCTE .
Ces vingt dernières années ont été marquées par une dégradation régulière de la qualité des relations entre donneurs d’ordres et fournisseurs, ce constat se vérifiant plus particulièrement dans les secteurs à forte concurrence internationale. L’intervention du Médiateur est donc d’assurer un lien de qualité entre clients et fournisseurs et d’améliorer, dans la durée, la relation entre donneurs d’ordres et sous-traitants au sein des filières.
Sa saisine se fait facilement et elle assure une confidentialité stricte dans le traitement des dossiers. Ces derniers sont alors étudiés en vue d’élaborer des solutions communes avec les parties prenantes.
DES DEBUTS ENCOURAGEANTS
Dans ce contexte, une charte des bonnes pratiques régissant les relations entre les donneurs d’ordres et les sous-traitants a été signée par 135 entreprises ou organisations socioprofessionnelles, notamment les grands donneurs d’ordres tels que Danone, EADS, EDF, Sanofi-Aventis, Eiffage… Cette Charte prévoit la mise en place d’indicateurs de suivi par chaque entreprise signataire afin qu’elle soit concrètement mise en œuvre.
Le rapport de M. Volot sur le dispositif juridique concernant les relations interentreprises et la sous-traitance avait mis en évidence l’abondance de la réglementation à ce sujet et la nécessité de la faire appliquer en développant un nouvel état d‘esprit favorable à l’industrie qui fédère tous les acteurs ; grands et petits, publics et privés. Il s’agit également de développer les bonnes pratiques au sein des branches professionnelles, comme ont su le faire les entreprises du BTP.
La médiation a donc mis l’accent sur une communication ciblée et active (publications, nombreuses manifestations, meilleure visibilité donnée à la CDAF, presse spécialisée nationale et presse locale…) ainsi que sur une bonne professionnalisation des médiateurs. Des médiateurs internes aux entreprises ont été institués.
BILAN ET PERSPECTIVES DE LA MEDIATION
Chiffres clés :
– Plus de 200 dossiers reçus ;
– 12 944 entreprises impliquées (dont 143 entreprises entrées en médiation individuelle et 12 801 entreprises concernées par les médiations collectives) ;
– 442 000 salariés ont été concernés par des relations contractuelles ou relationnelles déséquilibrées;
– 85% de taux de succès des médiations. Les 4 principaux motifs de saisine : Désengagement brutal, Non-respect des contrats tacites, Contrats commerciaux léonins, Délais de paiement.
Vers une labellisation des entreprises :
Durant l’année 2011/2012, il sera proposé une labellisation aux entreprises soucieuses de participer à l’émergence de cet écosystème compétitif. Cette labellisation permettra donc de mesurer objectivement les résultats obtenus en interne, en s’appuyant sur des organismes extérieurs. La Médiation et l’organisme VIGEO ont réalisé un référentiel des objectifs à atteindre qui comprend quatre domaines :
– Le respect des intérêts des fournisseurs et des sous-traitants
– L’intégration d’un pilier économique responsable dans les processus d’achats
– L’incorporation des facteurs environnementaux et sociétaux dans les politiques d’achat
– Les conditions de qualité des relations client-fournisseur
Les critères de labellisation envisagés par le rapport sont les suivants :
– La conformité à la loi des CGA et CGV (conditions générales de vente et d’achat)
– L’adoption d’ « un état d’esprit médiation »
– Un audit de satisfaction des fournisseurs
Ce rapport d’activité prouve donc toute l’efficacité de la médiation engagée, mais le Médiateur Jean-Claude Volot reste prudent et déterminé, en affirmant que « le jour où nos leaders de filières réaliseront la consolidation économique et sociale de leurs fournisseurs de rang 1, que ces derniers le feront avec les rangs 2, qui le feront avec les rangs 3… alors nous pourrons affirmer avoir bien travaillé » !
17 députés dénoncent un crime: la contre-façon pharmaceutique!
Certains médicaments ne guérissent pas. Produits par une industrie mafieuse, vendus en Europe occidentale comme dans les pays en développement, les médicaments contrefaits peuvent handicaper, voire tuer le patient.
En dépit de statistiques et d’études alarmantes, certains Etats ne semblent pas avoir pris conscience du danger. L’Organisation Mondiale de la Santé dévoilait récemment qu’un médicament sur dix, dans le monde, était contrefait. Pire encore: sur internet, nouveau lieu d’achat des consommateurs français et européens, ce serait le cas d’un médicament sur deux.
Un désastre d’ampleur sanitaire et économique se développe ainsi, dans le silence, à travers le monde. Dans de nombreux pays en développement, l’accès insuffisant aux soins médicaux et aux produits pharmaceutiques réglementés favorise un commerce parallèle florissant : les contre-facteurs fournissent aux populations isolées des contrefaçons peu coûteuses de produits reconnus.
Les réseaux transnationaux du crime pharmaceutique bénéficient d’un retour sur investissement colossal : produire ces contrefaçons exige très peu d’installations et les ingrédients, qui ne sont que des substituts bon marché – parfois de la poudre ou du plâtre, – peuvent être obtenus à un prix dérisoire. D’après une étude allemande, 1000$ investis rapporteraient 450 000$ aux criminels. Ce trafic serait ainsi plus lucratif que le trafic d’héroïne qui ne générerait que 20 000$ de retour sur l’investissement pour la même somme investie…
Dans les pays développés, l’opinion publique, convaincue que tout médicament disponible est nécessairement authentique, est peu sensibilisée à ce risque. Les professionnels de santé ne sont pas non plus suffisamment informés de la nécessité d’une vigilance constante sur l’origine et la qualité des médicaments.
Désorganisés, les Etats sont ainsi désarmés. Les dispositifs répressifs sont lacunaires: rares sont les pays à avoir adopté des législations réprimant la contrefaçon pharmaceutique. L’absence de coopération interministérielle (entre les autorités sanitaires, la police, la douane et la justice), à l’échelle nationale comme internationale, permet aux contrefacteurs d’échapper à la répression.
A défi transnational, réponse multilatérale. Malheureusement, les efforts nationaux et internationaux se sont souvent avérés à la fois lents et partiels. Depuis 2006, le dispositif IMPACT, engagé par l’OMS et Interpol, a permis de mener des opérations d’une grande efficacité, mais avant tout régionales. Lors de l’opération Storm, 16 millions de comprimés ont été saisis en Asie du Sud-Est. L’opération Pangea, en octobre 2010, a permis trois initiatives dans 44 pays d’Europe (dont la France), du Moyen-Orient, d’Asie et des Amériques, visant tout particulièrement le commerce de contrefaçons sur Internet. Elle a malheureusement exigé quatre longues années de maturation. De son côté, la commission européenne a voté le « paquet pharmaceutique » en décembre 2008 : 34 millions de comprimés contrefaits ont pu être saisis aux frontières du seul territoire communautaire. Cela ne suffit pas.
Il est impératif de donner un nouvel élan au processus IMPACT, sans attendre six ou dix ans, pour engager des actions fortes de sensibilisation auprès de l’opinion publique et de répression à l’encontre des criminels. Les rivalités d’intérêts entre nations doivent être surmontées. Davantage d’opérations frontalières et l’instauration de véritables échanges d’information interservices doivent être ordonnées par une mobilisation générale, que l’initiative de la France doit permettre – alors qu’elle démontre aujourd’hui sa détermination dans la promotion internationale du droit des gens.

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