Valeurs actuelles – Avril 2013
L’engagement présidentiel d’un budget de la Défense “stabilisé” ne vaut rien au-delà de 2014 : parce que notre pays sera économiquement à genoux et que la dépense publique sera, comme d’habitude avec la gauche, sollicitée pour créer des « emplois aidés ». De vraies frappes sont déjà préparées, sans la crainte de défilés syndicaux. Parions que le livre blanc, à la parution retardée, calibrera notre stratégie, pour la première fois, à notre situation budgétaire, et non l’inverse. Pourtant, le Gouvernement fait face à l’union sacrée : une du Monde, peu suspect de militarisme, liant « l’amputation budgétaire » au « déclassement national », cris d’orfraie de la présidente socialiste de la commission de la défense de l’Assemblée nationale, chacun a bien compris que le monde est plus dangereux qu’à l’époque soviétique : bombes « sales » à Paris, cyberattaques chinoises ou russes, conflit nucléaire au Proche ou au Moyen-Orient, voire en Asie orientale, nul pays n’est à l’abri d’une « surprise stratégique » d’une autre ampleur que celles qui ont marqué l’Histoire militaire du monde. Les interventions extérieures, elles-mêmes, nécessitent plus d’efforts de renseignement et d’entraînement parce que nos forces prépositionnées ont considérablement maigri alors que leur succès conditionne la stabilité politique et la reconstruction des États aidés.
Les États-Unis se désintéressent de nous : ils n’ont jamais accepté une défense européenne à l’extérieur ou dans l’Otan et se mobilisent désormais dans le Pacifique où la Chine est partout, au grand dam, notamment, du Japon et de l’Inde. Les intérêts de l’Europe — une non-puissance continentale — ne sont pas ceux de cette vraie puissance maritime qui a anticipé le basculement du monde vers l’Asie.
Les enjeux ne se mesurent pas seulement à l’aune de nos besoins en transport stratégique, renseignement, frappe aérienne ou avions ravitailleurs. Pas plus qu’en termes sociaux, alors que nos armées ont pourtant le mérite de recruter et de bien former des jeunes auxquels on offre, en plus d’une carrière, des valeurs inconnues ailleurs.
La guerre au Mali illustre la qualité remarquable de nos armées dont la mutation a été préparée au cours des dix dernières années. Soulignons que l’Afrique n’est plus seulement le continent du mil et du cacao, mais aussi du pétrole et des « terres rares » ; que nos approvisionnements énergétiques empruntent toujours des voies menacées par des conflits incontrôlables.
Rappelons aussi que la défense est notre seule véritable politique industrielle, adossée à des champions mondiaux et des chercheurs qui « trouvent » : sans eux, pas d’Airbus ni d’Ariane, de satellites ou de cryptographie. Nous avons déjà perdu la troisième place des exportateurs d’armement, derrière, c’est un comble, l’Allemagne — qui n’a pas d’ambition internationale et n’est pas membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies — et devant la Chine qui nous talonne. Quand on étale des programmes, on altère le financement de la recherche ; quand on les abandonne, les équipes de chercheurs se disloquent pour se reformer à l’étranger.
La défense, chez nous, comme partout dans le monde, est ainsi un levier de progrès économique et social. Elle est, en plus, la seule garantie de la sécurité de nos groupes industriels qui, comme Total, EDF ou Areva, sont aux avant-postes de la guerre économique qui sévit sur les marchés stratégiques. Une guerre sans image ni visage, où tous les coups sont permis.
Les imbéciles critères de Maastricht, qui limitent à 3 % le niveau de déficit euro-compatible, mêlent des dépenses publiques de confort avec celles qui assurent notre sécurité, notre rang, nos progrès. Parce qu’il y a des dépenses qui rapportent et des économies qui coûtent cher, il n’y a qu’une solution pour notre pays : que le président Hollande exige que l’on soustraie de l’application de ces critères les dépenses qui traduisent notre identité et garantissent notre liberté.

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