Lavaur, le 18 juin 1995
En prenant mes fonctions ce 18 juin 1995, je ne peux m’empêcher de penser à la leçon de volonté quenous donna un général rebelle qui, voici 55 ans, lança un appel, inspiré par le sens inné de la grandeur de laFrance et le refus de se soumettre à quelque fatalité que ce soit.
Au-delà du souvenir, ce geste un peu fou, dans lequel tant de Français saluent l’instinct du visionnaire, doitnous servir de guide, dans le rassemblement de nos concitoyens, autour d’objectifs simples et clairs :
– restituer l’espoir aux plus pauvres d’entre nous et à ceux que la chance a quittée depuis longtemps.
– assurer la prospérité de notre ville.
– concilier notre fidélité à nos racines, avec notre bonheur à préparer l’avenir.
Restituer l’espoir aux plus pauvres, communiquer le sentiment d’appartenir à une communauté de vie et dedestin à ceux qui se sentent seuls : voilà les devoirs les plus sacrés des élus. En confiant à des assemblées, désignées par le suffrage universel, le soin d’intervenir dans tant d’aspects de la vie économique, sociale ouculturelle des cités, le législateur a souhaité rapprocher l’administration des citoyens.
Pour récentes que soient les lois de décentralisation, elles n’en avaient pas moins été précédées de nombreuses initiatives, des grands décrets de décentralisation de la fin du Second Empire, à l’organisationrégionale envisagée par le Général de Gaulle.
Dans tous les cas, l’esprit est le même : il n’y a pas d’administration des hommes qui vaille s’il n’y a l’homme au cœur de la préoccupation administrative !
L’essentiel, pour nous, reste la réponse à apporter à la lancinante question du chômage, qui frappe à Lavaur tant de nos concitoyens. Un chômage qui brise bien des énergies et détruit tant de familles.
Et pourtant il ne saurait y avoir de fatalité, en ce domaine comme en d’autres. Les élus disposent d’unegamme étendue de moyens d’action. Une gamme sans doute complexe pour des élus qui n’ont pas toujours l’information ou la formation nécessaires. C’est là, chacun le reconnaît, le principal avatar de ladécentralisation.
En toute chose il faudra chercher l’excellence, et non se contenter de ce qui est connu et routinier. Noussavons que nous pouvons compter sur le dévouement, les compétences techniques, le sens de l’intérêt général des fonctionnaires communaux.
Je les recevrai d’ailleurs chacun, dès demain matin, afin de prendre la mesure des contraintes qui pèsentsur leur service, et de leurs aspirations personnelles ou collectives : pour leur rappeler aussi – je sais que« le superflu est chose très nécessaire » – notre attachement à gérer la commune avec économie,modération, et courtoisie. L’argent public est sacré, parce qu’il est le fruit des efforts des contribuables. (…)
*
Je serais incomplet si je ne vous disais la joie et la fierté de nous voir confier, par la population de Lavaur,le soin de conduire l’avenir de notre cité.
Je la remercie d’avoir participé largement à ce scrutin : voilà une belle preuve de son attachement à cemoment fort de la démocratie française.
Tocqueville, l’un des plus fins analystes de la vie politique française, estimait, voilà 150 ans, que la vie localeétait le lieu d’apprentissage par excellence de la démocratie.
J’exprime toute ma reconnaissance à l’égard de celles et ceux, anciens ou nouveaux Vauréens, qui ontmanifesté leur confiance à l’égard de la liste que je conduisais. Je remercie aussi mes colistiers, élus ou nonélus, de leur combativité et de l’élégance dont ils ont fait preuve tout au long de cette campagne, à l’égard de nos adversaires.
J’espère être digne, enfin, de ceux qui m’ont précédé : chacun, selon ses compétences, son tempérament ou ses convictions a fait du mieux qu’il pouvait. Tous ont été les serviteurs de leur cité qui plonge ses racines bien au-delà des nombreux régimes qui se sont succédés depuis la Révolution française : une cité dontl’histoire est marquée par la spiritualité ! Guiraude, Saint-Alain, les disciples de Calvin et puis les pénitents, lesClarisses, les Sœurs de la Croix ont illustré notre vie locale, de leur rayonnement spirituel ou personnel. Plusproche de nous, le docteur Guiraud, notre dernier député-maire (il le fut cinquante ans), à qui l’on doit, enpremier, la modernisation et l’humanisation de l’hôpital, fondé au début du 18ème siècle par Monseigneur deMailly-Nesle.
Bien d’autres figures ont illustré notre ville : le Général Bressolles, figure humaniste de la colonisationfrançaise, Gabriel Compayre, député et maire de Labastide-Saint-Georges, qui fut, comme inspecteur général de l’instruction publique, l’un des artisans des lois présentées par Jules Ferry; le résistant Jacques Besse aussi, torturé et fusillé par les Allemands en 1944.
Nous entretenons enfin, avec beaucoup de persévérance, le souvenir d’une femme, l’une des rares à avoirété, au Moyen-âge, seigneur d’une ville : Guiraude, dont la charité et la combativité sont deux beauxsymboles de Lavaur, les plus beaux peut-être… Avec sans doute la nostalgie de ceux qui restent, dans leurscœurs, un peu hérétiques. En somme, rebelles.
Ma foi, cet esprit rebelle, nous pouvons, un 18 juin, lui donner un nouveau souffle, afin que plus de sept sièclesaprès le deuil de Guiraude de Lavaur, le laurier refleurisse pour tous !

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