Magazine L’Élu local – Septembre 2015
J’ai horreur de parler d’argent : je suis issu d’une famille où le sujet était tabou. Catholique, tarnais et breton de souche, s’il est encore possible de revendiquer une identité enracinée dans l’Histoire de notre pays, cela explique tout.
Mais les socialistes m’imposent cet exercice, pour tout dire un peu vulgaire. Traditionnellement, ils aiment la dépense publique, les fonctionnaires et les impôts, surtout s’ils pèsent sur ceux qui ne votent pas pour eux… Encore qu’aujourd’hui, il faut être sacrément malin et furieusement riche pour échapper au matraquage fiscal : comme Pierre Bergé qui dispose d’un patrimoine en œuvres d’art d’un milliard d’euros, générant, chaque année, 20 % de plus-value sur laquelle il ne paye que 6 % ! En 2012, le quinquennat de François Hollande s’engageait sous les meilleurs auspices pour les élus, habitués à ce qu’un gouvernement socialiste contribue généreusement à l’augmentation de la dépense publique. Mais voilà, patatras ! On avait oublié que ceux-ci étaient beaucoup plus libéraux que les gouvernements de droite. Mitterrand avait montré la voie en dénationalisant deux ans après avoir nationalisé, en encourageant même quelques années plus tard, Paul Quilès, Ministre des PTT, à appliquer une directive européenne dérégulant le secteur dont il avait la charge. Jospin a même privatisé deux fois plus que Balladur. C’est dire. Que l’héritier de celui qui fut inhumé au cimetière des Grand’maisons à Jarnac choisisse de se soumettre à son tour aux funestes « critères de Maastricht » et se plie aux injonctions des marchés, n’a rien d’étonnant. Voilà au moins une fidélité dont il peut se prévaloir.
Sa campagne s’était pourtant adossée à la défense des services publics ! Des services publics, cela dit, déjà fragilisés par la réduction du temps de travail. A Lavaur, la mairie, par exemple, n’est plus ouverte le samedi matin. Lors du dernier projet de loi de finances, les élus socialistes avaient, de manière virulente, dénoncé la diminution, par le Gouvernement, de la dotation de l’Etat aux collectivités locales de 600 millions. Alors que, simultanément, était créé un fonds de péréquation pour les communes, prélevant aux « riches » pour donner aux « pauvres ».
Mais alors que cette fois, la baisse des dotations est 50 fois plus importante, les mêmes qui protestaient hier se taisent aujourd’hui. Quelques uns manifestent derrière le drapeau de l’AMF, votent timidement une délibération au conseil municipal mais, en réalité, se soumettent à cette décision historique du gouvernement : les erreurs des socialistes sont toujours historiques. A Lavaur, durant la crise financière de 2008 – 2009, j’avais décidé de soutenir l’activité de nos entreprises locales en triplant nos investissements, sans augmenter nos impôts, ou de peu. La gauche locale qui a la fierté d’être aussi nulle que la gauche nationale m’avait reproché d’avoir provoqué une augmentation de la dette. Il n’est pas indécent pourtant que le financement d’une médiathèque ou d’un stade soit porté par une demi-génération d’usagers, surtout si les taux d’intérêts sont bas… L’emploi des ouvriers locaux méritait bien cette « entorse » aux règles de bonne gestion auxquelles, c’est bien connu, sont attachés les socialistes. Ils ont trouvé un soutien auprès de la Chambre régionale des Comptes dont les magistrats sont habitués à juger de leur bureau la gestion des collectivités locales, à la différence des membres du corps préfectoral.
Résumons : de 2014 à 2020, Lavaur va perdre 4 100 000 € et notre Communauté de Communes Tarn-Agout (CCTA) 12 millions. Avec un effet de levier pour les investissements de 1 à 4 ou 5, cela signifie que les entreprises locales vont perdre l’équivalent de 50 millions de marchés publics. C’est beaucoup. Comme partout, les projets sur lesquels nous avions été élus seront rabotés ou repoussés. D’ici 2020, la baisse sera de 60 %, soit une année de recettes fiscales. Si nous devions compenser cette « contraction » de nos ressources par l’impôt, il aurait fallu voter une augmentation des taux de 8 % en 2015, puis envisager une progression de 13 % en 2016 et de 18 % en 2017. C’est vraiment beaucoup. Alors, on s’est contenté de 3 %. On ne remplace pratiquement plus les départs en retraite et on continue à servir aux « pots » de la Ville du jus de pomme local et du vin blanc sec, je vous rassure, très convenable, mais peu onéreux.
Un dernier mot sur l’emploi. Nous avons toujours eu une politique volontariste d’installation d’entreprises et de soutien à l’activité économique : 1 800 emplois installés ou créés en dix ans dans une ville de 10 000 habitants, c’est pas mal ; on a même été classé 11ème sur 900 communes[1] en terme de dynamisme économique. Un résultat d’ailleurs qui n’a aucune vertu pour la Chambre régionale des Comptes. Ni pour nos socialistes. Mais en un an, le nombre de chômeurs est déjà passé de 700 à 800 et la chute de nos investissements aggravera sans doute la situation. Surtout au guichet du CCAS. Passons sur les transferts de charges de l’Etat aux collectivités locales qui ne sont naturellement pas compensés. Le dernier en date est celui des réfugiés dont on nous demande de prendre en charge l’hébergement et la vie quotidienne. J’invite les bonnes âmes de gauche, qui nous demandent d’ouvrir notre cœur, d’ouvrir leurs portes.
[1] de plus de 10 000 habitants.

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