Rapport d’information : Les nouveaux outils de la politique industrielle (introduction)
Assemblée nationale – Mai 2005
La construction européenne est née en 1951 autour d’une politique industrielle – celle de la Communauté économique du charbon et de l’acier (CECA). L’élaboration d’un marché intérieur a nécessité ensuite l’établissement de règles communes, la politique de la concurrence prenant alors le pas sur la politique industrielle, absente du Traité de Rome.
Aujourd’hui, sans initiative française et sans un rééquilibrage rapide des politiques européennes de la concurrence, commerciale et industrielle, la nouvelle donne économique mondiale et les défis énergétiques et démographiques condamneront l’Union européenne à un sous-développement durable.
Une mauvaise appréciation du périmètre industriel de notre économie – et donc des enjeux et du nombre d’emplois concernés, ainsi qu’une approche européenne dogmatique de l’économie, ont jusqu’ici empêché toute anticipation et servi d’alibis à l’inaction. L’industrie est un « corps vivant » qui peut mourir si l’on n’y est pas attentif : l’exemple des industries automobiles britannique et américaine le montre à l’envi…
La France et l’Allemagne notamment, puissances industrielles historiques, ont joué un rôle naturel d’impulsion dans cette évolution nécessaire.
Le sauvetage d’Alstom par les Pouvoirs publics, l’intervention du Gouvernement dans l’OPA de Sanofi sur Aventis, avec pour objectifs la constitution du troisième groupe mondial de la pharmacie et le maintien en Europe des centres de recherche, ont marqué, malgré quelques voix discordantes, la fin de l’emprise des dogmes et une nouvelle prise en compte de la réalité du fonctionnement de l’économie mondiale.
La prise de conscience des délocalisations d’entreprises et d’emplois dues à la mondialisation, l’interrogation sur la perte de substance industrielle de la France, ont suscité un regain d’intérêt collectif. Depuis dix-huit mois, l’idée d’une politique industrielle volontariste n’est plus taboue. L’expression de « politique industrielle[1] » est à nouveau employée dans le discours politique et dans de nombreux rapports. Tous recommandent une action offensive des pouvoirs publics.
Par la nomination – inédite dans son histoire- d’un Commissaire chargé de la politique en faveur des entreprises et de l’industrie, la Commission européenne a donné un signe de la préoccupation de certains États membres. Toutefois le Traité constitutionnel européen soumis à la ratification des 25 membres de l’Union n’évoque pas la notion de politique industrielle nationale et/ou européenne, même s’il consacre le régime « d’économie sociale de marché » dans lequel les États, comme l’Union, pourront avoir un rôle d’impulsion, de soutien et d’accompagnement.
Le Président de la République et le Gouvernement ont manifesté leur volonté respective de maintenir et de développer l’industrie française et européenne : annonce de la création de l’Agence de l’innovation industrielle[2], préconisée par Jean-Louis Beffa, création de l’Agence nationale de la recherche (ANR), appel à projets pour des « pôles de compétitivité », rapprochement de l’Agence nationale pour la valorisation de la recherche (ANVAR) et de la Banque pour le développement des PME (BDPME) dans une structure commune (OSÉO), premiers éléments d’une politique publique d’intelligence économique avec la nomination d’un haut responsable au Secrétariat général de la défense nationale.
Après avoir évoqué les divergences d’approche et d’analyse concernant la notion d’industrie et les politiques pouvant s’y rattacher ainsi que nos handicaps naturels, ce rapport décrit l’essentiel des outils participant de la politique industrielle, qu’il s’agisse des structures, des instruments financiers, fiscaux ou juridiques. Il propose quelques objectifs, principes et mesures simples qui pourraient faciliter la lisibilité et la cohérence de ces outils. Leur insertion, surtout, dans une réflexion stratégique qui reste, encore, à engager.
[1] L’évolution de la présence de cette notion dans les médias est présentée en annexe 4.
[2] L’Article 5 du projet de loi relatif à la confiance et à la modernisation de l’économie prévoit la création de cette agence.

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